Alfred Vallette, par Rachilde

Liens dans cette page : Rachilde : Portraits d’hommes
Notes
Paul Petitot : Critique de Portraits d’hommes
Notes

Journal littéraire de Paul Léautaud au 14 décembre 1928 :

Vallette1 me demande ce matin si j’ai toujours l’article que Rachilde2 a écrit sur moi dans L’Éclair, et dont elle a besoin.

Je cherche dans mon bureau et je le monte. Rachilde est justement là et je le lui donne en lui disant qu’elle peut le découper à son gré, que j’ai deux autres numéros de L’Éclair3. Elle me remercie et me dit que cela lui évitera du travail. Cela annonce-t-il que je vais écoper d’un nouvel article d’elle ?

Annonce des Portraits de Rachilde dans Les Nouvelles littéraires du 15 décembre 1928

Le soir, comme je suis chez Vallette, elle arrive lui donner du courrier. Je lui dis : « Alors, vous allez écrire des Souvenirs ? J’ai vu cela annoncé ce matin dans les Nouvelles littéraires. » Elle saute ! Elle n’a rien vu. Elle va chez elle chercher le numéro. Elle voit l’annonce. Elle s’emballe. Elle parle de tout rompre. Toujours la folle. Je lui dis qu’elle n’a qu’à écrire à Martin du Gard4 pour lui dire qu’elle ne veut pas de ce titre. Un point, c’est tout. On fera ce qu’elle voudra. Elle m’explique que ce qu’elle va publier dans les Nouvelles, ce sont des Portraits d’hommes5. Je le lui réitère. Ils voudront probablement mettre un titre général. N’attendez pas que cela soit fait. Écrivez-leur pour leur dire celui que vous voulez qu’on mette. Vallette m’approuve, en ajoutant : « Rien n’est plus simple. » Parbleu !

Soudain, elle me tape sur le bras et me dit : « Venez donc, si vous avez un moment. Je vais vous montrer quelque chose. » Je la suis chez elle. Là elle m’explique que sa série de Portraits d’hommes commence par celui de Vallette, qu’il n’en sait rien et qu’elle a une peur du diable de recevoir un savon de lui. Elle me dit qu’elle va me le lire et me demande de lui dire mon avis. Elle me dit que, elle qui travaille si facilement, elle a mis trois jours à écrire ce morceau. Elle me le lit. La façon de décrire le cabaret de la mère Clarisse, rue Jacob, est bien un petit peu phraseur et littéraire mais le portrait de Vallette est très réussi, très juste, pas un trait inexact dans une grande sobriété. Je le lui dis. Elle a l’air très contente.

Elle parle, dans ce portrait, d’une sorte de regret que Vallette garde, au secret de lui, et dont il est bien probable que personne ne se doute. Je lui dis à ce sujet le mot que m’a dit récemment Vallette, dans une des conversations sur les débuts du Mercure que nous avons eues à propos du livre de souvenirs de Fontainas6-7-8 : « Vous, van Bever9, vous avez eu des loisirs, vous avez pu vous cultiver, vous augmenter, apprendre, savoir des choses. Moi, pas. Bouclé, fermé complètement, irrémédiablement » — mot qui m’a révélé, ce soir-là, le regret qu’il garde et cache au fond de lui, et dont, je l’avoue, je le croyais bien libéré. Rachilde et moi nous trouvons enchantés mutuellement de ce qu’elle a écrit et de ce que je lui dis, qui nous montre à tous deux la justesse de notre impression.

Comme elle me répète qu’elle ne sait pas du tout comment Vallette prendra ce portrait et qu’il se peut très bien qu’il la « ramasse » je lui dis ceci : « Écoutez. Je vais peut-être vous dire une chose un peu indiscrète. Je ne sais pas si vous vous embrassez souvent. Mais je suis bien sûr qu’après avoir lu cela, il vous embrassera. Ce sera toute sa réponse. »
[…]

Rachilde m’a montré sur la table la liste de ses Portraits. Je dois certainement y figurer. La façon dont elle m’a dit, en me demandant de la suivre chez elle : « Je veux vous montrer… Vous me donnerez votre avis… Je ne veux pas mettre de choses qui vous déplaisent… » (pour donner le change à Vallette, ne voulant pas dire devant lui qu’il s’agissait de son portrait). Ensuite, la demande ce matin de son article de L’Éclair. Cela ne m’enchante pas. Si elle répète cet article rocambolesque de L’Éclair

Après la parution dans Les Nouvelles littéraires décrite à la note cinq, ces Portraits d’hommes seront réunis dans deux éditions en volume en 1929. Une édition de luxe chez Mornay et une édition courante au Mercure. Chez Mornay10, chaque auteur bénéficie d’une vignette gravée par Jacques Boullaire11 et d’une première initiale en couleur.

L’édition Mornay

Rachilde : Portraits d’hommes12
I : Alfred Vallette

Un peu de préhistoire (1884-1885)

En ce temps-là, l’esprit de la littérature soufflait sur les bocks du cabaret de la Mère Clarisse, appelé familièrement ainsi par ses habitués. Un cabaret dit alsacien13, où la bière de Strasbourg venait de Strasbourg même ! Petit coin de la rue Jacob14, un peu sombre, tranquille, n’accrochant pas le regard par des tons violents, seulement orné de bons tableaux du peintre Feyen-Perrin15, barques de pêche et vues du large sans trop de houle pour les promenades berceuses de la rêverie.

Le manuscrit de Rachilde

Se réunissaient là, autour de cinq ou six tables, des hommes faits pour s’entendre à mi-voix : Van Muyden16, graveur de talent, qui esquissait les têtes de ses amis sur un album, malheureusement perdu, Charles Cros17, Beauclair18, Montaigu, le peintre Alfred Poussin19, Paul Morisse20, Albert Samain21, Laurent Tailhade22, Jean Moréas23, Georges Lorin24, Marsolleau25, Paul Arène26, Metcalff27, Willam Vogt28, Édouard Dubus29, Louis Denise30, Ratez31, Raoul Dumon32, Bonheur33, l’ami et conseiller d’Albert Samain, Alfred Vallette…

Première parution dans Les Nouvelles littéraires

Discussions toujours courtoises et paradoxes souriants qui n’affirmaient que le plaisir de risquer des mots neufs sur le vieux tapis de la controverse.

Ceux qui vont, aujourd’hui, au Bœuf sur le toit34 et ont la coutume de lire les derniers communiqués des batailles littéraires sur des murs tendus de draps d’or seraient étonnés, sinon gênés, de retrouver ce modeste endroit où35 des gens les plus simples du monde célébraient entre eux, dans une ombre discrète, une espèce d’office religieux en l’honneur de la littérature, déesse que les plus fervents n’osaient implorer par son nom. On ne la priait pas dans un but intéressé, on ne lui demandait pas de miracle et on était pourtant certain de son existence, ce qui suffisait à combler ses fidèles. Timides les uns, réservés les autres, plusieurs cachaient pudiquement leurs enthousiasmes, redoutant les profanes ou les railleurs… et quelques types de ces amoureux d’art moururent de leur passion sans en avoir connu toute la néfaste puissance.

On y buvait modérément, on y fumait davantage car les nuages bleutés de tabac favorisent les divines apparitions. On y citait des vers anciens ou nouveaux, sans les déclamer, en s’appuyant sur une colonne… mais ils avaient, ces vers, presque tous la consonne d’appui36. On y commentait des articles de journaux sans vitupérer et, souvent, un très jeune s’emportait, noblement, contre un pontife ou un poncif.

Il n’y avait pas d’écoles, prônées ou définies, de classification aux étiquettes barbares.

Le naturalisme expirait sous le lourd écroulement de ses propres pierres de taille, si mal retenues par le ciment de critiques ennuyeuses, et on aspirait à des choses plus serrées, plus subtiles, mais personne ne se déclarait prophète et on pensait, d’un commun accord, que le génie est d’une essence tellement rare qu’on doit en avoir peur, d’une peur hésitant entre la crainte de la folie ou le commencement de la sagesse !

En fait d’écoles, y-eut-il jamais, du reste, que le farouche désir… de renverser l’ancienne, celle qui sut s’imposer au public ?… Lorsqu’on a beaucoup vécu, on s’aperçoit que les plus redoutables révolutions, en art comme en politique, n’amènent qu’à des évolutions plus lentes. Quand tout est par terre, il arrive un homme têtu, un révolutionnaire ayant réfléchi, qui ramasse, entasse, met de l’ordre à sa manière, et construit un nouveau monument avec d’ancien matériaux.

Cependant le symbolisme fut une belle manifestation d’art faite par des artistes sincères mais, à y bien songer, ce ne fut peut-être que la silhouette du vieux romantisme collée sur un étendard de papier de luxe, une sorte de somptueux épouvantail hallucinant auquel on ajoutait, selon les circonstances, le chapeau du jardinier en chef de la nouvelle culture qu’on ne choisissait pas toujours avec discernement : tantôt une paille percée, tantôt un bicorne à plume et parfois la casquette d’un employé de banque. Il sortit de tout cela quelques bonnes aventures pour des mots oubliés de la langue française dont on ignorait, relativement, le véritable sens. En mettant la charrue avant les bœufs, on laissa pousser, dans le champ réduit à l’état sauvage, une herbe libre qui tout en n’étant pas du meilleur blé de France, pouvait encore servir de tisane dépurative à certaines crises de gâtisme chez les chers Maîtres.

On luttait à coup de poésies transcendantales qui ne… tranchaient rien du tout, pas même les différends sur la syntaxe, et l’on peina sur des livres abscons qui prenaient du temps à leurs auteurs tout en épargnant celui du lecteur. La littérature qui produit le moins est toujours la plus respectée : il vaut mieux n’écrire qu’un chef-d’œuvre. Quand il y en a plusieurs dans la vie d’un écrivain, fussent-ils très ratifiés, ils ne font qu’embrouiller l’idée qu’on désire avoir de lui. Un bon livre, c’est une légende, trois ou quatre bons livres égarent les opinions. Le critique préfère en demeurer au premier et les lecteurs s’imaginent que ça n’est plus du même

Si tous n’en moururent pas, durant ce combat héroïque, tous en furent frappés37 au meilleur coin de la médaille.

Dans la dernière guerre, la vraie, il y a des gens qui se trouvèrent guéris de leurs crampes d’estomac en vivant sous les obus, alors que d’autres, bien portants et robustes, furent écrasés par la mitraille ! Il a donc surgi du symbolisme des auteurs solidement trempés, ayant parcouru tous les dictionnaires, reprenant goût au français tout court et ceux qui en sont morts ont droit à la couronne du martyre, laquelle vaut bien le pain quotidien (ou celui des quotidiens) au regard de l’éternité.

 . . . . . . . . . . . . . . . . .38

Toujours hermétiquement serré dans un veston-dolman qui ne laissait passer, du faux-col, qu’un mince filet de linge, les cheveux en brosse, drus et bruns, la moustache rousse, ou saurie39 par les multiples cigarettes, le masque grave, aux trais réguliers, l’œil incisif, Alfred Vallette paraissait un peu trop sérieux, l’air d’un officier en bourgeois40, mais s’égayait volontiers au sujet d’un détail perçu de lui seul, jusqu’à la raillerie la plus impitoyable.

L’édition Mercure

Le futur directeur de la revue que vous savez parlait souvent de Flaubert en ces réunions intimes de la Mère Clarisse. Avec Albert Samain et Paul Morisse, les poètes tendres et délicats, il devisait sur une prose plus sévère, qu’il voulait impeccable, la résumait d’un mot coupant, revenant habituellement dans ses conversation : synthèse. Le naturalisme l’offusquait presque autant que les tirades romantiques et s’il prisait fort les perfections techniques de Baudelaire, il gardait un sourire narquois devant les mèches éparses des Muses 1830. Saisir la vie dans ce qu’elle a de bon ou de mauvais, par le menu détail soigneusement choisi, fixer le paysage par sa nuance propre et non par l’état d’âme d’un seul témoin, décrire un être en le montrant par ses gestes sans y ajouter des intrigues inutiles à sa personnelle psychologie, était le travail qui le préoccupait avant même la conception du roman. Comme il le prétendait, une vie ne suffirait peut-être pas pour accomplir convenablement une pareille tâche. Plaire à un public capricieux, amateur d’images violentes, ou aimables, sans proportions avec le sujet, ne l’inquiétait guère et il ne se doutait pas que ce qu’il cherchait dans le juste milieu du réalisme était rien de moins que la trouvaille de l’absolu !… Dès qu’il s’en rendit compte, ou que la vie vient le chercher au fond de ses retranchements, il cessa d’écrire… ce qui est peut-être la plus noble façon de renoncer à l’art pour le seul amour de l’art. Il eut pourtant le loisir de créer une œuvre sincèrement réaliste, aussi loin du naturalisme que du romantisme, merveille de patience et de vérité qu’un éditeur (oh ! les éditeurs !) accepta en l’affublant d’un titre ridicule41. Mais la puissance du souvenir de ce livre est encore telle chez les survivants du petit cénacle que lorsqu’on leur en parle ils peuvent en citer, de mémoire, certains passages. J’ai dit : Loisir à dessein au sujet d’une œuvre de grand labeur parce que les écrivains de cette époque-là faisaient tous un autre métier que celui d’homme de lettres. Ils écrivaient vraiment pour leur satisfaction et selon leur conscience.

Albert Samain était dans un bureau de l’Hôtel de Ville. Alfred Vallette dirigeait un atelier de typographie et, est-ce que le fondateur du Théâtre libre, Antoine42, le grand Antoine, ne fut-il pas employé à la Compagnie du gaz ?… Ce qu’ils leur fallait risquer de tours de force pour aller renouer avec l’autre étude, encore mystérieuse ? Mais aussi quelle ivresse dans ce plaisir jusqu’à une certain point défendu… dont les écrivains modernes ont fait un métier permis ! (Qu’on veuille bien remarque que je ne juge pas : je constate. Ancienne par l’âge et moderne par l’utilisation insolente du procédé, je ne blâme quiconque ! Mais j’ai été assez blâmée par les critiques des deux époques pour avoir, ou prendre le droit, de dire toujours ce que je pense, dussé-je encourir perpétuellement toutes les foudres !)

Alfred Vallette, bourgeois de Paris, issu d’une lignée de bourgeois bien rangés, bien sages, avait et a toujours tous les excès en horreur… à part les excès de travail ! S’il abandonna le travail littéraire pour lui, il l’organisa volontiers pour les autres et devint, sans le savoir ni le vouloir, un animateur, celui de son groupe. Et ce qui fut d’abord, pour ce groupe fondateur, un passe-temps d’art entre soi, devint une revue, celle qui eut longtemps l’honneur d’être appelée : la Revue des Deux Mondes des jeunes !43

Ce qui différencie le bourgeois racé de l’aristocrate ou plutôt de l’autocrate, c’est le mépris du panache (en l’espèce : de la spéculation), panache du luxe ou panache de guerre, mais la destinée n’épargne pas ceux qui doivent animer, réunir, diriger des hommes de valeur. Le premier qui fut roi fut un soldat heureux44, le premier qu’on choisit pour le lier, peut-être le crucifier à une œuvre, c’est celui qui acceptera la plus lourde tâche, qui saura trouver son bonheur en obéissant à la plus exigeante des consignes et demeurer soldat vainqueur, peut-être malheureux.

Nul ne saura jamais, excepté le45 journaliste qui signe ces lignes, de quelle patience, de quelle abnégation et de quelle terrible clairvoyance Alfred Vallette dut s’armer pour enserrer dans les liens de toutes les précautions le petit être turbulent que fut cette revue à son berceau ! J’entends d’ici les camarades, vieux ou jeunes, se chuchoter à l’oreille : « Parbleu ! nous en ferions tous autant si nous étions sûrs d’en arriver là. » Non ! personne, je vous le jure, n’en voudrait faire autant pour arriver à s’être tout simplement privé de la seule joie intellectuelle de ce monde : vivre son rêve, rester libre, faire de la littérature pour soi, se mettre soi dans une formule au lieu d’y maintenir les autres. Car, lorsqu’on dirige une revue, ce n’est pas une fois qu’il faut éprouver tout l’enthousiasme de la conception d’une œuvre c’est tous les jours et tous les jours il faut mettre son cerveau au service de tous les cerveaux qui la forment… sinon cherchent à la déformer !

C’est la main de fer… dans le gant de papier, et si l’on a la poigne suffisante pour ne pas s’y briser les doigts on peut y user son enthousiasme…

Rachilde

Voir aussi :
La mort d’Alfred Vallette ;
Rachilde ;
Le Mercure de France (1890).


Notes

1       Alfred Vallette (1858-1935), d’abord typographe, a été ensuite secrétaire de rédaction puis directeur du Scapin (1er septembre 1886). Mais Alfred Vallette est surtout connu pour être l’un des fondateurs (1890) et le directeur de la revue puis des éditions du Mercure de France jusqu’à sa mort en 1935. C’est dans Le Scapin qu’Alfred Vallette a publié en feuilleton son roman Monsieur Babylas (depuis le numéro onze, du premier mai 1886). Ce roman sera publié en volume au tout début de 1891 sous le titre Le Vierge chez Tresse et Stock (495 pages). Alfred Vallette a écrit un second roman (en collaboration avec Raoul Minhar), À l’écart, paru la même année 1891 chez Perrin.

2       Marguerite Eymery (1860-1953), personnage complexe, a épousé Alfred Vallette le 12 juin 1899. Rachilde tient la rubrique des « Romans » dans le Mercure. Elle a publié une soixantaine d’ouvrages.

3       Comme toutes les maisons de presse ou d’édition, le Mercure de France recevait un service de presse. Il n’est pas impossible que plusieurs collaborateurs en étaient destinataires, dont évidemment Georges Batault, titulaire de la rubrique des « Journaux » après la mort de Jean de Gourmont.

4       Maurice Martin du Gard (1896-1970), écrivain et journaliste, petit-cousin de Roger Martin du Gard (le grand-père de Roger était le frère du grand-père de Maurice) et fondateur des Nouvelles littéraires, dont le premier numéro est paru le 21 octobre 1922, six rue de Milan. Direction : Jacques Guenne et MMG, rédacteur en chef : Gilbert Charles.

5       Les onze portraits d’hommes que l’on peut consulter dans Les Nouvelles littéraires : 22 décembre 1928, Vallette, 5 janvier 1929, Willy, 19 janvier, Maurice Barrès, 9 février Jean Lorrain, 23 février Albert Samain, 9 mars, Verlaine, 23 mars, Jean de Tinan, 6 avril Laurent Tailhade, 20 avril, Remy de Gourmont, 4 mai, Léon Bloy, 18 mai, Paul Léautaud. La série, numérotée de 1 à 11, s’arrête là, à moins qu’un douzième portrait ait figuré dans les nombreuses pages des NL de cette période, manquantes chez Gallica. À cette liste, les deux éditions en volume de Mornay et du Mercure de 1929 ajouteront Jean Moréas, Jules Renard, Louis Dumur et Léon Delafosse.

La couverture du Mercure de France

6       André Fontainas (1865-1948), docteur en droit à Bruxelles, poète et critique français. Après des débuts poétiques à Bruxelles, André Fontainas s’est installé à Paris en 1889 et est nommé bibliothécaire à l’Office du travail au ministère du Commerce, de l’Industrie et des Colonies. Son premier texte dans le Mercure de France est le poème Épilogue, paru dans le numéro d’avril 1892. En décembre 1893 André Fontainas a écrit quelques textes dans la rubrique « Livres » avant d’être titulaire en 1896 de la rubrique « Arts » puis d’assurer en 1908 la chronique des « Théâtres », où il sera remplacé par Maurice Boissard. André Fontainas a été le lien entre les poètes symbolistes belges et français et écrira au Mercure jusqu’à sa mort. Il fait partie des Poètes d’aujourd’hui, dont la notice a été rédigée par Adolphe van Bever. On lira sa nécrologie dans le Mercure de février 1949, page 300.

7       André Fontainas Mes souvenirs du Symbolisme, éditions de la Nouvelle revue critique, novembre 1928, 221 pages. Ce livre a été réédité en Belgique en 1991 chez Labor. En 1936, André Fontainas parviendra à faire publier au Mercure un autre livre de souvenirs, Confession d’un poète, 221 pages.

8       Cette conversation avec Alfred Vallette a eu lieu il y a moins d’un mois. Journal littéraire au 19 novembre 1928 : « Fontainas publie un volume, aux éditions de la Nouvelle Revue critique : Mes souvenirs du Symbolisme. Dans l’exemplaire arrivé pour Vallette, dans l’envoi, ces mots : à qui ces souvenirs n’ont pas plu, et l’indication de la page 63. À cette page, tout un paragraphe amer, sur la trop grande prudence de Vallette, actuellement, qui non seulement ne s’intéresse pas aux nouveaux venus mais refuse même d’accueillir les anciens de la maison, qui se trouvent, de ce fait, sans éditeur. »

MES SOUVENIRS DU SYMBOLISME	63
Ernest Raynaud, Julien Leclercq, Albert Aurier, Jean Court, Louis Denise, et aussi l’auteur d’un roman réaliste très serré de composition et de style, très vériste et très navrant, le Vierge : Alfred Vallette. Alfred Vallette se révélait d’une intelligence organisatrice et lucide, patiente et avisée ; il fut de la revue et de la maison d’éditions qui s’ensuivit le fondateur, le mainteneur incomparable, en dépit des obstacles. C’est lui qui en assura la prospérité, avec une prudence héroïque dans les débuts, mais qui, plus tard, si vénérable qu’on l’estimât, a pu être parfois considérée comme excessive. La revue poursuit son existence assurée et triomphale, universellement appréciée ; mais la maison d’éditions sur un fonds d’une solidité indiscutable n’appuie pas un élan d’audace ou seulement de confiance en l’avenir ni même en le temps présent. Elle s’est désintéressée, à l’exception de deux ou trois d’entre ses auteurs, du renouveau ou de la continuité de production de ceux-là même qui ont pris part à ses difficultés et à ses succès, et qui, contre leurs espoirs et leurs prévisions d’alors, demeurent désormais dépourvus d’éditeur.
Une société anonyme s’assouplit forcément aux seules considérations de son budget et de ses dividendes. C’est merveille que Vallette l’ait pu soutenir et développer sans sacrifier la part prépondérante. ou, du moins, égale de sa tenue strictement littéraire et intellectuelle.
Aux collaborateurs du premier numéro s’unirent, durant l’année 1890, Remy de Gourmont, Laurent

9     Adolphe van Bever, (1871-1927), bibliographe et érudit. Paul Léautaud et lui se sont rencontrés à l’école communale de Courbevoie et sont restés amis. Dans ses Entretiens avec Robert Malet de 1951, PL dira de lui : « van Bever, qui était un être d’une précocité étonnante et d’un naturel hardi, entreprenant, faisait des conférences. Il ne devait pas avoir plus de quatorze ou quinze ans environ et il organisait des conférences littéraires à la mairie de Neuilly. » Vers la fin du siècle, van Bever et Paul Léautaud ont habité ensemble par économie. Adolphe, à ce moment-là était secrétaire au Mercure après l’avoir été au théâtre de l’Œuvre. À son départ en 1912, Paul Léautaud a occupé son bureau. En décembre 1999 ils ont publié ensemble les Poètes d’aujourd’hui.

10     C’est aussi chez Mornay que paraîtront, en décembre 1929 des Lettres de Paul Léautaud.

11     Jacques Boullaire (1893-1976), fils de notaire, commençait alors sa carrière et exposait au salon des « Indépendants » et au salon d’Automne. La sœur de Jacques Boullaire, Christiane (1895-1979), a épousé en septembre 1918 l’industriel Louis Renault (1877-1944), de dix-huit ans son aîné. Ce mariage entrainera Jacques Boullaire à dessiner des voitures par centaines. En 1935, Christiane Renault sera la maîtresse de Pierre Drieu La Rochelle qui l’a ainsi faite passer de l’industrie à la culture tout en restant dans le même milieu politique. Cette aventure lui a inspiré le roman Beloukia, paru à la NRF en juin 1936 (219 pages).

12     Ce texte est paru une première fois dans Les Nouvelles littéraires du 22 décembre 1928.

13     Les italiques sont toutes de l’édition Mercure de 1930.

14     Vraisemblablement 23, rue Jacob.

15     Augustin Feyen-Perrin (Augustin Feyen, 1826-1888), frère cadet du peintre et photographe Jacques-Eugène Feyen. Les vues évoquées par Rachilde sont vraisemblablement de Cancale, où les frères Feyen passaient leurs vacances. Elles sont peut-être davantage dues à l’aîné qu’au cadet, qui s’est plutôt intéressé à la vie paysanne qu’à celle des pêcheurs.

16     Deux graveurs peuvent correspondre à la définition, tous deux suisses. Le père, Alfred Van Muyden (1818-1898), illustrateur et graveur, et son fils Evert (ou Everet, 1853-1922), graveur, peintre et illustrateur. Le fait que le père soit âgé de 58 ans à l’époque décrite par Rachilde, incline davantage à préférer le fils, dans ce cénacle où la jeunesse domine.

17     Le poète Charles Cros (1842-1888) n’a jamais collaboré au Mercure, sauf une fois à titre largement posthume dans le numéro du premier septembre 1938. Charles Cros est surtout connu comme l’inventeur de phonographe, qu’il n’a jamais pu réaliser faute de moyens, ce que parviendra à mettre en œuvre l’homme d’affaires et inventeur Thomas Edison. Charles Cros est de nos jours un peu oublié. Son fils, Guy-Charles Cros (1879-1956), que connaissent davantage les lecteurs du Journal littéraire a davantage fréquenté le Mercure et a intégré les Poètes d’aujourd’hui dans l’édition de 1930.

18     Henri Beauclair (1860-1919), poète, romancier et journaliste, surtout connu pour son pastiche de poésie décadente écrit en collaboration avec Gabriel Vicaire Les Déliquescences d’Adoré Floupette paru en 1885.

19     Alfred Poussin (1834-1901), à la fois peintre et poète et en même temps ni l’un ni l’autre, auteur d’une plaquette de vers : Versiculets, éditée grâce au concours de ses amis (Ernest d’Orllanges, Paul Morisse, William Vogt…) et un ouvrage, La Jument morte. Lire sa nécrologie dans le Mercure d’avril 1901 page 286.

20     Paul Morisse a partagé le bureau de PL à partir de janvier 1908 jusqu’en 1911. Le 9 décembre 1913, PL l’a dit âgé de 47 ou 48 ans, ce qui le ferait naître vers 1865. Le 30 mars 1942, PL a écrit : « Été voir Paul Morisse dans sa librairie avenue de Breteuil. 76 ans, mémoire défaillante, surdité, un vrai petit vieux. » Dans Le Littéraire du 19 octobre 1946 André Billy évoque Paul Morisse « qui vient de mourir. » Paul Morisse est aujourd’hui connu pour être le traducteur des Hymnes à la nuit de Novalis en 1908 (voir au 26 octobre 1908) et aussi de Stefan Zweig pour son Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre en 1910. Voir aussi André Billy, Le Pont des Saint-Pères, Fayard 1947, pages 35-37.

21     Albert Samain (1858-1900), poète symboliste, a fait partie des Poètes d’aujourd’hui dès la première édition en 1900. Sa notice a été rédigée par Adolphe van Bever. La jeunesse lilloise d’Albert Samain a été faite de « petits boulots » avant d’arriver à Paris en 1880. Il a fait partie des fondateurs du Mercure de France en 1890 et ses poésies ont été publiées dès les premiers numéros. Le succès est venu à l’automne 1893 avec la parution de son premier recueil : Le Jardin de l’infante, très remarqué par François Coppée et bien entendu encensé par Pierre Quillard dans le Mercure d’octobre. La collaboration d’Albert Samain avec le Mercure ne cessera qu’à sa mort en août 1900. Lire dans le Mercure d’octobre suivant les articles de Louis Denise et de Francis Jammes.

22     Laurent Tailhade (1854-1919), polémiste, poète, conférencier pamphlétaire libertaire et franc-maçon. Paul Léautaud a rédigé sa notice des Poètes d’aujourd’hui dès la première édition de 1900.

23     Jean Moréas (Ioánnis À. Papadiamantópoulos, 1856-1910), poète symboliste grec d’expression française. En 1886, Jean Moréas, Paul Adam et Gustave Kahn ont fondé la revue Le Symboliste. Le jeune Jean Moréas a parfois publié dans de petites revues sous le pseudonyme de Vincent Muselli. Voir Alexandre Embiricos « Les débuts de Jean Moréas » dans le Mercure du 1er janvier 1948, page 85.

24     Georges Lorin (1850-1927), peintre, illustrateur, caricaturiste et poète. En tant qu’illustrateur, Georges Lorin a parfois signé Cabriol.

25     Louis Marsolleau (1864-1935), poète, auteur dramatique et auteur de chansons.

26     Paul Arène (1843-1896), poète provençal, collaborateur (nègre) d’Alphonse Daudet et auteur, notamment, de Jean des figues en 1868. On ne confondra pas Paul Arène avec Emmanuel Arène (1856-1908), homme politique et auteur dramatique.

27     Il s’agit très vraisemblablement du peintre américain Willard Leroy Metcalf (avec un seul f) (1858-1925), qui a séjourné en France de 1883 à 1888.

28     Peut-être William Vogt (1859-1918), pamphlétaire antimaçonnique et politicien suisse.

29     Le poète symboliste Édouard Dubus (1864-1895, à 31 ans), a brûlé la vie par les deux bouts. Il a participé à la fondation du Mercure de France, auquel il a collaboré, ainsi qu’au Scapin, au Cri du peuple… Il n’a écrit qu’un seul livre : Quand les violons sont partis, Bibliothèque artistique & littéraire, 1892. Pour les circonstances de la mort d’Édouard Dubus, voir la nécrologie de Jean Court parue dans les « Échos » du Mercure du 15 février 1933, page 234.

30     Louis Denise (1863-1914), poète, critique d’art, bibliothécaire à la Bibliothèque nationale, ami d’Albert Samain, de Léon Bloy et de Louis Le Cardonnel. Louis Denise, comme ici Albert Samain et Louis Dubus, participera à la création du Mercure en 1890.

31     Peut-être Émile Ratez (1851-1934), altiste et compositeur de musique, directeur du conservatoire de Lille en 1891 et complètement oublié de nos jours.

32     Raoul Minhar est le pseudonyme de Raoul Dumont. Avec Alfred Vallette ils ont écrit ensemble le roman À l’écart, dont on a pu lire la critique par Jules Renard dans le Mercure de juillet 1891.

33     Peut-être Raymond Bonheur (1861-1939), compositeur de musique. Raymond Bonheur a mis en musique des vers de Francis Jammes et de Maurice Maeterlinck. Le Prélude à l’après-midi d’un faune, de Claude Debussy, composé en 1892 d’après Mallarmé est dédié à Raymond Bonheur.

34     Dans un paragraphe qu’il n’a pas paru nécessaire de reproduire de cette journée du 14 décembre 1928 qui ouvre cette page — ce paragraphe était alors hors-sujet —, Rachilde a évoqué ce Bœuf sur le toit : « Rachilde me raconte alors : “Il faut que je vous dise une très belle histoire encore. Je ne sais pas si vous connaissez le Bœuf sur le toit, le restaurant de ces messieurs… [Louis Moysès, Jean Cocteau, Darius Milhaud]” Vallette interrompt en riant : “Lui ? (moi). Voyons ! Il ne connaît pas du tout cela…” Elle continue : “Un décor inimaginable. Des colonnes, avec un éclairage bizarre. Sur une colonne le portrait de Cocteau. Sur une autre colonne, le portrait de Z. Voilà qu’un jour, Moïse [sic], le patron, me demande si je ne voudrais pas qu’on mette aussi mon portrait, là, avec les deux autres. Vous pensez si j’ai sauté. J’ai voulu rester polie, tout de même. Je me suis contentée de lui répondre : Vous allez tout de même un peu loin : Je ne suis pas Liane de Pougy”. » Ce restaurant de la rue Boissy d’Anglas, près de la Madeleine fondé en 1922 a été particulièrement célèbre. L’expression « ces messieurs » dans la bouche de Rachilde, qui savait bien de quoi elle parlait est ici employée dans un tour particulier.

35     L’établissement de la rue Jacob.

36     « La consonne d’appui est la consonne qui, dans deux mots qui riment ensemble, se trouve placée immédiatement devant la dernière voyelle ou diphtongue pour les mots à rime masculine, et immédiatement devant l’avant-dernière voyelle ou diphtongue, pour les mots à rime féminine. » (Banville, Petit traité de poésie française, 1881, p. 56) (TLFi). Les rimes pauvres n’ont pas de consonne d’appui.

37     Référence évidente aux Animaux malades de la peste : « Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés ».

38     Ligne de points dans Les Nouvelles littéraires comme dans l’édition Mercure de 1930. Rachilde n’a pas encore parlé de Vallette. Nous y arrivons.

39     Le saurissement (notamment du hareng) consiste à un séchage à la fumée, éventuellement après salage. D’où le hareng saur.

40     Fille d’officier, Rachilde sait de quoi elle parle et fait allusion à la rigueur naturelle d’Alfred Vallette.

41     Le Vierge, Tresse et Stock, 1891, précédemment nommé Monsieur Babylas.

42     André Antoine (1858-1943), comédien, metteur en scène, directeur de théâtre, considéré comme l’inventeur de la mise en scène moderne. Directeur du théâtre des Menus-Plaisirs en 1888, il lui a donné son nom. En 1906, André Antoine est directeur du Théâtre de l’Odéon, qu’il quittera en 1914 pour se tourner vers le cinéma puis la critique dramatique et la critique de cinéma, notamment au Mercure de France (28 textes, d’octobre 1938 à mars 1940).

43     La Revue des deux mondes, fondée en 1829, était encore à cette époque une revue de référence avant de devenir la revue très à droite que nous connaissons.

44     Voltaire, Mérope, acte I, sc III. Par « heureux », Polyphonte entend ici « chanceux ». Pas Rachilde.

45     Sic dans l’impression des Nouvelles littéraires comme dans l’édition du Mercure.


Paul Petitot

Que vient faire Paul Petitot ici et qui est-il ? Les lecteurs du Journal littéraire l’ont un peu oublié parce qu’il y apparaît peu. C’est même l’un des rares livres où il est cité.

Paul Petitot apparaît dans le Journal littéraire à la date du premier mars 1927 :

Il y a trois ou quatre jours, un M. Paul Petitot, rédacteur dans un journal de l’est, écrit au Mercure pour demander le service de presse des dernières nouveautés, puis si Le petit Ami est vraiment épuisé, puis mon adresse, en disant qu’il doit publier, à la fin de la semaine, dans un journal de Paris, L’Étincelle, un article sur le Théâtre de Maurice Boissard. Vallette me passe la lettre pour que je réponde.

Je réponds que nous envoyons les livres demandés, que Le petit Ami est réellement épuisé et que s’il a à écrire à Paul Léautaud, qu’il lui écrive au Mercure, puisque c’est lui-même qui lui écrit.

Ce matin, lettre charmante de ce M. Paul Petitot, — dont m’a parlé Fagus, en effet, — accompagné de la coupure de son article dans L’Étincelle, samedi dernier, article charmant également, tout à fait sympathique. Il me dit entre autres choses qu’il est bien regrettable que Madame Cantili, Villégiature et Chroniques soient abordables pour les seuls gens riches, et que je le comblerais s’il m’en restait un exemplaire. Demande aussi d’un service des Poètes d’aujourd’hui. Je me suis fendu. Il me restait un exemplaire ordinaire de Villégiature que je gardais pour le vendre. Je le lui ai envoyé, ainsi qu’un des trois exemplaires sur papier d’épreuves qui me restent de Madame Cantili. J’y ai joint les Poètes d’aujourd’hui. Cela m’a fait plaisir de faire plaisir à ce critique littéraire, qui est en même temps pour moi un lecteur. Je lui ai en même temps écrit quelques lignes pour accompagner ce volume. J’ai fait tout cela tout de suite, car si j’avais remis au lendemain, selon mon habitude, je n’aurais rien fait.

Paul Petitot sera davantage connu par sa future épouse, la romancière Marie Madeleine de Swarte (1885-1951), immortelle auteure, avec Willy, de Mady écolière, paru chez Albin Michel en 1922 (321 pages). Il semble que Marie Madeleine de Swarte ait été, avant Paul Petitot, l’épouse de Sylvain Bonmariage, que les léautaldiens connaissent bien aussi.

Puisque nous y voilà, profitons-en pour parler un peu de ce brave baron Sylvain Bonmariage de Cercy d’Erville (1887-1966), homme de lettres et romancier, un peu plagiaire. Je ne veux pas d’un prince, encore moins d’un baron.

Paul Léautaud a parfois évoqué Sylvain Bonmariage, comme le neuf juin 1933 (le léautaldien trouvera facilement) et l’on peut préférer la chronique dramatique parue dans Les Nouvelles littéraires du premier juin 1922 et sa délicieuse description de la rue Saint-Sulpice :

Regardez un peu la rue Saint-Sulpice quand vous y passerez. Elle a, je m’exprime peut-être mal, des attraits personnels et des attraits de perspective. Qu’on la regarde d’une extrémité ou de l’autre, la vue est charmante. De la rue de Condé, où elle commence c’est, à l’autre bout, passé la muraille noirâtre de Saint-Sulpice, l’éclaircie soudaine de la place Saint-Sulpice, comme un grand espace de lumière. Quand on la regarde de la place Saint-Sulpice, elle semble fermée, à l’autre extrémité, par le côté gauche de la rue de Condé et la vieille maison élégante et sobre, aux hautes fenêtres garnies de glycines, au rez-de-chaussée de laquelle la papeterie Gallin-Fuzelier a ses magasins. Parcourez-la maintenant dans sa partie la plus agréable, celle comprise entre la rue de Condé et la rue de Tournon. À gauche, un serrurier, une crémerie, un rétameur, un antiquaire, une fruiterie, une herboristerie, un marchand de cuirs, un autre antiquaire. Il y a même, au numéro…, au premier étage, une Mme X…, qui fait, de dix heures à sept heures, des massages sur lesquels la confusion n’est pas possible. J’ai appris cela tout récemment, en lisant par curiosité une petite feuille qui fait sa spécialité de ces annonces, et, l’autre matin, comme je passais dans la rue, j’ai vu entrer là l’écrivain Sylvain B…, qui me connaît moins que je le connais, et qui ne se doutait guère que je le regardais. Encore un qui n’a pas dû faire un bon mariage pour qu’il ait ainsi le besoin de se faire masser d’aussi bonne heure.

Nous laissons le lecteur deviner qui était ce pauvre « Sylvain B… ». Espérons que Madeleine de Swarte n’a pas lu cette chronique dramatique.

Mais ne nous égarons pas davantage que Paul léautaud dans ses chroniques et revenons à notre brave Paul Petitot et voyons pourquoi il est question de lui dans cette page.

À la parution de Portraits d’Hommes, comme tous les auteurs, Rachilde a envoyé à la presse nombre d’exemplaires de son livre, dont un à Paul Petitot, alors rédacteur à L’Étoile de l’est. Les journalistes littéraires reçoivent des montagnes de livres qu’ils ne peuvent pas tous conserver, et puis il n’y a pas de petits profits, le livre a été vendu. Quand ? Quel a été son parcours, en combien de mains est-il passé avant que notre ami Maxime Hoffman tout ému ouvre, fin mars 2022, le paquet envoyé par son libraire ? Il nous est tous arrivé de rêver là-dessus… de mains en mains.

« Un achat de choix, et de cœur », écrit Maxime. Et dans cet exemplaire de Portraits d’Hommes à peine sorti de l’enveloppe kraft matelassée, Maxime a découvert, glissée par Paul Petitot, une colonne de journal toute ratatinée, extraite de L’Étoile de l’est, le texte de son article ainsi conservé. De mains en mains, l’article est resté, servant peut-être parfois de marque-pages.

Scan, OCR, voici l’article. Inutile de chercher L’Étoile de l’est sur le site web de la BNF ou chez RetroNews, il n’existe pas. Voici donc un article que personne n’a lu depuis mai 1930. Rien que pour nos yeux, disait James Bond.

Portraits d’Hommes, par Paul Petitot46

Quel plaisir de retrouver, après les avoir lus dans les Nouvelles Littéraires, ces saisissants et pittoresques Portraits d’Hommes, peints avec un talent remarquable — mais qui ne connaît la griffe de Mlle Baudelaire ? — par la célèbre Rachilde !

Ces admirables Portraits d’Hommes s’ouvrent par un magnifique — et combien expressif — portrait de femme, celui de Mme Rachilde, par l’artiste Nel Haroun47. Mais le journaliste indépendant, le romancier audacieux qu’est Rachilde n’a-t-il mérité d’être qualifié d’homme de lettres dans le pénétrant essai critique dû à la plume élégante d’André David48, un jeune qui ira loin ?

À tout seigneur tout honneur, Mme Rachilde consacre son premier portrait à son mari, Alfred Vallette, directeur du Mercure de France. Un peu de préhistoire (1884-1885), tel est le sous-titre de ce chapitre.

C’est en ce temps-là, en effet, que les poètes symbolistes et futurs collaborateurs de la revue, qui eut longtemps l’honneur d’être appelée : la Revue des Deux-Mondes des jeunes, se réunissaient au cabaret de Mère Clarisse, petit coin de la rue Jacob : Albert Samain, Laurent Tailhade, Jean Moréas, Paul Morisse, Charles Cros, Édouard Dubus, etc…

Toujours hermétiquement serré dans un veston-dolman, les cheveux en brosse, la moustache rousse, le masque grave, l’œil incisif, Alfred Valette avait l’air d’un officier en bourgeois. Sans le savoir, ni le vouloir, abandonnant le travail littéraire pour lui, il devint un animateur : la main de fer… dans le gant de papier.

Maurice Barrès49 représente pour Rachilde l’immortelle province. Elle fit la connaissance de ce grand garçon de vingt-deux ans chez un commun éditeur, qui avait fait faillite. C’est lui, le directeur des Taches d’encre50, qui baptisa Rachilde : Mademoiselle Baudelaire, et écrivit une préface pour « ce livre effarant, effrayant et si délicieux » : Monsieur Vénus51, qui avait valu à Rachilde deux ans de prison et deux mille francs d’amende, en Belgique52. Vêtue en homme, elle était avec le prince de la jeunesse, révolté dilettante, quand elle fut conduite au poste, lors d’une émeute d’étudiants.

Willy53, l’à peu près grand homme54, est le type du spirituel viveur parisien, le plus naïf et le plus doux des hommes. La première fois que Rachilde, jeune fille en blanc pur, le rencontra dans le monde, ce fut dans le salon de l’observatoire de la rue Cassini55, où pontifiait, devant la grande lunette, l’astronome Camille Flammarion.

Auréolé du fameux bord-plat, le chapeau légendaire56, Willy, fils de la maison Gauthier-Villars, tombeur de musiciens et de femmes, qui tue son prochain pour lancer un mot inédit. « Willy, c’est Paris affinant la plante de province, l’émondant et la forçant en serre pour qu’elle donne des fleurs doubles ».

Rachilde a connu Jules Renard, le paysan perverti57, tout à fait à ses débuts. « Ce grand et robuste garçon, haut en couleur, avait des yeux en trous d’épingle dans un abat-jour : on devinait qu’une lampe brûlait derrière ! » Elle a connu aussi la charmante héroïne du Plaisir de rompre58, qui disait partout, à propos de tout, les Roses de Jules Renard, poète élégiaque, avant de fuir dans la peau d’un humoriste.

Jean Lorrain, ce fanfaron de vices59, est l’auteur du premier article que l’on fit sur Rachilde, article terrible et fou intitulé : Mademoiselle Salamandre60. Elle tira son grand camarade d’un mauvais pas ; des chenapans ne l’avaient-ils pas laissé nu comme un ver dans un hôtel borgne de l’ignoble rue Galande61 ! Le romancier de Monsieur de Bougrelon62, ami tendre et sage, était à la fois le peintre et le modèle de ses héros.

C’est Albert Samain63, dont Rachilde salue avec une délicate émotion la glorieuse modestie, qui la présenta à Alfred Vallette, son futur époux. Il fut un de leurs témoins et passa toute la nuit de leurs noces en discussion sur la littérature.

Paul Verlaine, le tendre maudit, fut amené à Rachilde par le jeune dessinateur Cazals64, un soir que le poète au masque bizarre de faune ou de guerrier Mongol avait eu une terrible discussion avec son propriétaire. Rachilde installa chez elle, rue des Écoles, Verlaine, la jambe blessée, les habits en lambeaux, et elle alla coucher, quai de la Tournelle, chez madame sa mère.

Jean de Tinan, le beau ténébreux, l’auteur de Penses-tu réussir ?, était un arriviste dans le bon sens du mot. Ce jeune fou, toujours drapé dans une cape 1830, a conté dans Aimienne ou le détournement de mineure65, une aventure délicieuse, dont il fut le héros sentimental.

« C’est vous, Rachilde ! Ah ! prêtez-moi votre éventail… J’ai bien- chaud ! », telles sont les paroles prononcées par Tailhade66, masse informe d’où pendait une tête pâle, un œil arraché, quelques instants après l’explosion du restaurant Foyot67, au coin de la rue de Condé, où il dînait avec une dame. L’intrépide capitaine de… l’armée contre les Mufles68 était victime de son dilettantisme. Comme Tailhade, le poète à la cravate rouge, qui lui dédia la première édition de Au pays du mufle, Rachilde avait de la sympathie pour l’anarchiste Ravachol, un saint à rebours, et elle signa un article : Ravachilde.

Rachilde fit la connaissance du doux poète Moréas69, le grec latin, par une gifle qu’elle lui administra en plein café de lettres, au Soleil d’Or70. Le Ronsard du symbolisme n’avait-il pas traité Victor Hugo de… sot ? Moréas n’en devint pas moins le meilleur ami de Rachilde, dont il cacha chez lui les exemplaires poursuivis de Monsieur Vénus.

Voici Léon Bloy71, l’ange exterminateur, taillé dans un bloc de bois dur, celui de la vraie croix, qui déclara à Rachilde qu’elle vivait en concubinage avec son mari et que cela ne pouvait pas durer. Il aurait voulu qu’elle repassa par l’Église où il lui aurait servi de témoin, mais Rachilde avait autre chose à faire. Voici Louis Dumur, le volontaire Français72, esprit sage et pondéré, sectaire protestant et Suisse, depuis plus de trente ans au Mercure.

Voilà Remy de Gourmont, le libertin mystique73, le monsieur qui suit les femmes et aborda Rachilde au Jardin du Luxembourg. Un lupus de la tuberculose défigura complètement le visage du plus célèbre de nos philosophes modernes, Bénédictin, du couvent de la pensée. Voilà, enfin, Paul Léautaud, l’insociable, le redoutable Diogène du tonneau d’ivoire du Mercure, le saint ami des chats et des chiens, dont nous avons parlé dans une précédente chronique, — et Léon Delafosse, l’enfant-maître, le prince distant de la musique.

On ferme le précieux album de Madame Rachilde, cette fantaisiste vieille France sans frein ni loi, avec le regret de n’avoir plus de Portraits d’Hommes à admirer.

Paul Petitot


Notes pour l’article de Paul Petitot

46     Article de Paul Petitot paru dans L’Étoile de l’est du seize août 1930.

47     En 1934, Rachilde avait écrit Mon étrange plaisir, à La Baudinière, sorte de mémoires de son amant, le jeune Joan Nicolaï Nicolesco, danseur roumain connu à la scène sous le nom de Nel Haroun, vivant davantage des largesses de vieilles dames que de ses exhibitions dénudées. Rachilde a écrit avec Nel Haroun un ouvrage en commun, L’Autre crime, Mercure 1937, 226 pages. Voir le Journal littéraire au seize décembre 1936. Mon étrange plaisir a été réédité par Édith Silve au printemps 1999 chez Joëlle Losfeld (Gallimard) (128 pages). Voir aussi l’article de Pierre Philippe « Rachilde saisie par la débauche », dans Le Monde du 21 août 1998.

48     André David (1899-1988), homme de lettres catholique ignoré, a publié Rachilde, Homme de lettres — Son œuvre en 1924 aux éditions de La Nouvelle revue critique (86 pages). Rachilde et André David ont publié ensemble Le Prisonnier aux Éditions de France en 1928 (218 pages).

49     Pour les rapports entre Rachilde et Maurice Barrès, voir la page « Rachilde ».

50     Cet éditeur commun était René Brissy (1856-1930) chez qui Maurice Barrès a publié ses Taches d’encre, « gazette mensuelle » depuis novembre 1884. En début était donné cette information : « Brochure de luxe, format in-18 Jésus [environ 12 x 18 cm], de cinquante à cent pages environ, devant paraître le cinq de chaque mois, du 5 novembre 84 au 5 octobre 85. Les Taches d’encre n’auront que douze numéros et pas de collaborateurs. »

51     Rachilde et Francis Talmant, Monsieur Vénus, roman matérialiste, chez Auguste Brancart à Bruxelles, 1884, 238 pages. Il ne subsiste aucune trace de ce Francis Talmant qui semble n’avoir jamais existé ni n’avoir eu d’autre but que de partager la bien lourde responsabilité de l’ouvrage pour une jeune femme de vingt-quatre ans. Les éditions parisiennes ultérieures ont bénéficié d’une préface de Maurice Barrès.

52     Rachilde ne retourna pas en Belgique et échappa ainsi aux poursuites.

53     Willy (Henry Gauthier-Villars, 1859-1931), fils d’éditeur, journaliste, critique musical et romancier, surtout connu pour voir épousé Colette en 1893.

54     Titre du chapitre Willy.

55     C’est Rachilde elle-même qui écrit, page 47 « Nous nous trouvions dans le salon de l’Observatoire de la rue Cassini ». Il s’agit de l’observatoire de Paris. Pourquoi la rue Cassini, où l’observatoire ne se trouve pas et non l’avenue de l’Observatoire qui se trouve dans l’axe de l’observatoire avec sa coupole bien repérable ?

56     La plupart des photographies de Willy le représentent en Cronstadt, qui est un haut-de-forme moins symétrique et légèrement cintré. Le chapeau à bord plat est celui que portait Paul Fort, ou André Gide dans le dessin de Félix Vallotton. Mais c’est Rachilde qui l’écrit, page 50 et elle le sait mieux que nous. Paul Petitot n’a fait que reprendre paresseusement le début de la phrase.

57     Ce sous-titre est de Rachilde, qui se souvient davantage de la naissance de Jules Renard à Chitry-les-Mines dans la Nièvre que de sa naissance à elle du côté de Château-l’Évêque en Dordogne.

58     Comédie en un acte de 1897 qui a été le premier succès de Jules Renard au théâtre. Cette comédie assez autobiographique évoque la rupture de Jules Renard avec son aînée Danièle Davyle avant son mariage avec la riche Marinette.

59     Ce sous-titre est aussi de Rachilde. La littérature « fin de siècle » de Jean Lorrain (Paul Alexandre Martin Duval, 1855-1906) à tendance audacieuse, peut par ce côté être rapprochée de celle de Rachilde ou d’Hugues Rebell. Jean Lorrain se crée d’ailleurs une personnalité en ce sens, ce qui fait un peu penser à un Brummell ou à un Montesquiou décomplexé, s’amusant à transformer le bal des Quat’z’Arts en gay pride bien avant l’heure.

60     Dans Le Courrier Français du douze décembre 1886 où Paul Léautaud écrira ses premiers vers sept et huit ans plus tard. Jean Lorrain cite un fragment du dernier chapitre de La Marquise de Sade : « Son être d’une chair incorruptible passait au milieu des hystéries de son temps comme la salamandre au milieu des flammes » et conclut son article par « en somme, une rouée très ingénue ou une ingénue très rouée, une vierge très perverse, une oseuse doublée d’un timide, une chaste qui a tout désiré, tout rêvé et puis méfiante a préféré s’en tenir là ; mieux qu’un bas-bleu, un cordon-bleu expert dans l’art d’accommoder les truffes, une femme pour les collégiens, un joli garçon pour les vieux messieurs, un revenu pour son éditeur, un homme d’esprit pour les chroniqueurs, un monstre pour les imbéciles, Mlle Salamandre, ma seule amie. »

Début de l’article de Jean Lorrain dans le Courrier Français du douze décembre 1886, page six.

61     Le square Viviani est face à Notre-Dame, de l’autre côté de la Seine. La rue Galande se trouve derrière le square Viviani. Très étroite et quasi-piétonne la rue Galande en est de nos jours une rue très agréable.

62     Jean Lorrain, Monsieur de Bougrelon, avec des illustrations de Luděk Marold et Mittis édité par la librairie Morel en août 1897 (235 pages).

63     Albert Samain (1858-1900), poète symboliste, a fait partie des Poètes d’aujourd’hui dès la première édition en 1900. Sa notice a été rédigée par Adolphe van Bever. La jeunesse lilloise d’Albert Samain a été faite de « petits boulots » avant d’arriver à Paris en 1880. Il a fait partie des fondateurs du Mercure de France en 1890 et ses poésies ont été publiées dès les premiers numéros. Le succès est venu à l’automne 1893 avec la parution de son premier recueil : Le Jardin de l’infante, très remarqué par François Coppée et bien entendu encensé par Pierre Quillard dans le Mercure d’octobre. La collaboration d’Albert Samain avec le Mercure ne cessera qu’à sa mort en août 1900. Lire dans le Mercure d’octobre suivant les articles de Louis Denise et de Francis Jammes.

64     Frédéric-Auguste Cazals, (1865-1941), dessinateur, illustrateur et écrivain.

65     Entre mars 1895 et mars 1899 Jean de Tinan a écrit quatorze articles pour le Mercure et, sur deux numéros, son roman Aimienne ou le détournement de Mineure (« Aimienne » étant Minnie, la fille de J.-H. Rosny aîné). Paul Léautaud écrira « L’Ami d’Aimienne » dans le Mercure d’août 1899. Jean de Tinan a écrit en tout six romans, dont deux signés Willy.

66     Laurent Tailhade (1854-1919), polémiste, poète, conférencier pamphlétaire libertaire et franc-maçon. Paul Léautaud a rédigé sa notice des Poètes d’aujourd’hui.

67     L’Hôtel Foyot, au 33, rue de Tournon, a été démoli en 1937. Cet hôtel avait été acheté en 1848 par Foyot, cuisinier de Louis-Philippe. Foyot a fait fortune en six ans et revendu son affaire. Raymond Radiguet y est mort de typhoïde en 1923. Il était situé à l’époque à l’angle de la rue de Vaugirard. Une fois l’hôtel démoli son l’emplacement est resté vacant, laissant, entre la rue de Tournon et la rue de Condé qui sont presque parallèles, une placette ombragée nommée « square Francis-Poulenc » agrémentée d’un minuscule espace vert et d’un kiosque à journaux. PL évoquera ce terre-plein le deux février 1940. La superbe rue de Tournon est située dans l’axe du Sénat. Le restaurant Foyot où ont été blessés Laurent Tailhade et sa compagne Julia Miahle à l’occasion d’un attentat anarchiste le quatre avril 1894 se trouvait rue de Condé.

68     Allusion au Pays du mufle, de Laurent Tailhade, chez Léon Vannier, 1891.

69     Jean Moréas (Ioánnis À. Papadiamantópoulos, 1856-1910), poète symboliste grec d’expression française. En 1886, Jean Moréas, Paul Adam et Gustave Kahn ont fondé la revue Le Symboliste. Le jeune Jean Moréas a parfois publié dans de petites revues sous le pseudonyme de Vincent Muselli. Jean Moéas a fait partie des Poètes d’aujourd’hui dès la première édition de 1900 où sa notice a été rédigée par Adolphe van Bever. Voir Alexandre Embiricos « Les débuts de Jean Moréas » dans le Mercure du 1er janvier 1948, page 85.

70     Ce café du Soleil d’or se trouvait au un boulevard Saint-Michel, à l’angle du quai Saint-Michel. C’est toujours un café de nos jours.

71     Léon Bloy (1846-1917), polémiste catholique, mystique et sulfureux. La langue exacerbée de Bloy — que l’on pourrait rapprocher de celle de Céline — conduit parfois à une lecture difficile. Le caractère de cet homme, exigeant et intraitable a conduit toutes ses relations à l’éloignement (y compris les milieux catholiques), ce qui l’a entraîné dans une extrême pauvreté. Léon Bloy a été particulièrement proche de Jules Barbey d’Aurevilly et il est impossible de citer celui-ci sans celui-là. On peut noter ici qu’Henri Cayssac a fréquenté (et vraisemblablement secouru) Léon Bloy. C’est Remy de Gourmont qui a introduit Léon Bloy au Mercure, qui a publié plusieurs de ses œuvres.

72     Le sous-titre est de Rachilde, par allusion au fait que Louis Dumur, citoyen suisse avait été un acharné anti-Allemand pendant la guerre.

73     Le sous-titre est encore de Rachilde, allusion au titre du livre de Remy de Gourmont Le Latin mystique. Les poètes de l’antiphonaire et la symbolique au moyen âge (Mercure 1892). La préface de J.-K. Huysmans sera remplacée par une préface de Remy de Gourmont dans les éditions postérieures. Miniature en couleurs de Filiger en couverture. Grand in-8 de 400 pages.